Présentation :

« Le Lion et le Chasseur » est la deuxième fable du Livre VI de Jean de La Fontaine, publiée en 1668. Elle met en scène un chasseur fanfaron qui, après avoir perdu son chien, soupçonne un lion de l’avoir dévoré. Cherchant à se venger, il interroge un berger qui lui indique la direction du lion. Mais lorsque le lion apparaît, le chasseur prend la fuite, révélant ainsi que le courage proclamé en paroles ne résiste pas à l’épreuve du danger réel. Morale : le véritable courage se manifeste dans l’action, non dans les discours.

– Jean de La Fontaine (1668)

Un fanfaron, passionné de chasse,
Ayant perdu un chien de bonne race
Qu’il soupçonnait d’avoir été mangé par un lion,
Rencontra un berger. « Indique-moi, je te prie,
Où habite ce voleur, dit-il,
Que je lui fasse justice sur-le-champ. »

Le berger répondit : « C’est vers cette montagne.
En lui donnant chaque mois un mouton,
Je peux me promener librement dans la campagne
Et vivre en paix. »
Au moment où ils parlaient,
Le lion surgit, marchant d’un pas rapide.
Le fanfaron s’empressa de fuir ;
« Ô Jupiter, montre-moi un refuge,
S’écria-t-il, qui puisse me sauver ! »

La véritable preuve de courage
Se manifeste dans le danger imminent :
Celui qui le recherchait, disait-il,
Change de discours et s’enfuit dès qu’il le voit.



Présentation :

« Le Milan et le Rossignol » est la dix-huitième fable du Livre IX de Jean de La Fontaine, publiée en 1678. Elle met en scène un rossignol capturé par un milan, tentant de sauver sa vie en offrant son chant en échange. La fable illustre que les belles paroles ou les talents artistiques ne peuvent pas toujours émouvoir ceux qui sont motivés par des besoins plus pressants. Morale : Ventre affamé n’a point d’oreilles.

– Jean de La Fontaine (1678)

Après que le Milan, voleur bien connu,  
Eut semé l’alarme dans tout le voisinage  
Et fait crier sur lui les enfants du village,  
Un Rossignol tomba entre ses griffes, par malchance.  
Le messager du Printemps lui demande la vie :  
« À quoi bon manger un être qui n’a que du son ?  
Écoutez plutôt ma chanson ;  
Je vous raconterai l’histoire de Térée et son désir. »  
– « Qui, Térée ? Est-ce un mets pour les Milans ? »  
– « Non, c’était un Roi dont les passions violentes  
Me firent ressentir leur ardeur criminelle :  
Je vais vous chanter une chanson si belle  
Qu’elle vous ravira : mon chant plaît à chacun. »  
Le Milan lui répond alors :  
« Vraiment, c’est le moment, lorsque je suis affamé,  
De me parler de musique.  
Parle-en plutôt aux Rois. Quand un Roi te prendra,  
Tu pourras lui conter ces merveilles :  
Mais pour un Milan, il s’en rira :  
Ventre affamé n’a point d’oreilles. »


Présentation :

« Le Chartier embourbé » est la dix-huitième fable du Livre VI des Fables de Jean de La Fontaine, publiée en 1668. Elle raconte l’histoire d’un charretier dont le chariot est enlisé dans la boue. Après avoir invoqué l’aide d’Hercule, une voix céleste lui répond que l’aide divine vient à ceux qui s’aident eux-mêmes. La morale de cette fable est devenue un proverbe célèbre : « Aide-toi, le Ciel t’aidera. » Elle souligne l’importance de l’effort personnel et de l’initiative face aux difficultés.

– Jean de La Fontaine (1668)

Un conducteur de charrette à foin
Vit son chariot embourbé. Le pauvre homme était loin
De toute aide humaine : c'était à la campagne
Près d'un certain coin de la basse Bretagne,
Appelé Quimper-Corentin.
On sait bien que le Destin
Envoie là les gens quand il veut qu'on enrage :
Dieu nous préserve d'y aller en voyage !
Pour en revenir au charretier embourbé dans ces lieux,
Le voilà qui peste et jure de son mieux,
Pestant, dans sa fureur extrême,
Tantôt contre les trous, puis contre ses chevaux,
Contre son chariot, contre lui-même.
Il invoque enfin le dieu dont les travaux
Sont si célèbres dans le monde :
« Hercule, lui dit-il, aide-moi ; si ton dos
A porté la machine ronde,
Ton bras peut me tirer d'ici. »
Sa prière étant faite, il entend dans les airs
Une voix qui lui parle ainsi :
« Hercule veut qu'on se remue ;
Puis il aide les gens. Regarde d'où vient
L'obstacle qui te retient.
Ôte autour de chaque roue
Ce malheureux mortier, cette maudite boue
Qui jusqu'à l'essieu les recouvre.
Prends ton pic et casse ce caillou qui te gêne.
Comble-moi cette ornière. As-tu fait ? – Oui, dit l'homme.
– Eh bien, je vais t'aider, dit la voix : prends ton fouet.
– Je l'ai pris. Qu'est-ce que c'est ? mon chariot avance à souhait.
Hercule en soit loué ! » Alors la voix : « Tu vois comme
Tes chevaux aisément se sont tirés de là.
Aide-toi, le Ciel t'aidera. »



Présentation :

« Le Vieillard et l’Âne » est la huitième fable du Livre VI de Jean de La Fontaine, publiée en 1668. Elle met en scène un vieillard et son âne confrontés à l’arrivée d’un ennemi. L’âne, indifférent au changement de maître, illustre la résignation face à l’autorité, soulignant que pour certains, peu importe qui détient le pouvoir, car les conditions restent les mêmes. Morale : Notre ennemi, c’est notre maître.

– Jean de La Fontaine (1668)

Un vieillard, chevauchant son âne, aperçut en passant
Un pré plein d'herbe et en fleurs.
Il y lâcha sa bête, et le grison se précipita
À travers l'herbe fine,
Se vautrant, se grattant et se frottant,
Gambadant, chantant et broutant,
Et rendant de nombreuses zones nettes.
L'ennemi arriva sur ces entrefaites :
« Fuyons », dit alors le vieillard.
« Pourquoi ? » répondit le paillard.
« Me fera-t-on porter double bât, double charge ? »
« Non pas », dit le vieillard, qui prit aussitôt la fuite.
« Et que m'importe donc, dit l'âne, à qui j'appartiens ?
Sauvez-vous, et laissez-moi paître :
Notre ennemi, c'est notre maître :
Je vous le dis en bon français. »



Présentation :

« Le Cerf et la Vigne » est la quinzième fable du Livre V de Jean de La Fontaine, publiée en 1668. Elle raconte l’histoire d’un cerf qui, pour échapper à des chasseurs, se cache sous une vigne. Une fois le danger passé, il mange les feuilles de la vigne qui l’a abrité. Cette ingratitude le trahit, les chasseurs le retrouvent et le tuent. Morale : Ceux qui nuisent à leurs bienfaiteurs finissent par en subir les conséquences.

– Jean de La Fontaine (1668)

Un cerf, pour échapper à des chasseurs, se cache sous une vigne très haute,
Comme on en voit dans certains pays.
Il se met à l'abri et échappe à la mort.
Les chasseurs, pensant que leurs chiens se sont trompés, les rappellent.
Le cerf, hors de danger,
Se met à manger la vigne qui l'a protégé, quelle ingratitude extrême !
On l'entend, on revient, on le fait fuir,
Il vient mourir à cet endroit même.
"J'ai mérité ce juste châtiment", dit-il,
"Prenez-en de la graine, ingrats." Il tombe à ce moment.
La meute le dévore. Pleurer devant les chasseurs arrivés à sa mort ne lui servit à rien.
Véritable image de ceux qui profanent l'asile
Qui les a sauvés.



Présentation :

« Le Serpent et la Lime » est la seizième fable du Livre V de Jean de La Fontaine, publiée en 1668. Elle met en scène un serpent qui, cherchant de la nourriture, tente de ronger une lime en acier. La lime lui répond que ses efforts sont vains, car il s’attaque à plus fort que lui. Morale : Ceux qui cherchent à nuire à plus forts qu’eux s’épuisent en vain.

– Jean de La Fontaine (1668)

On raconte qu’un serpent, voisin d’un horloger  
(Ce n’était pas un bon voisinage pour l’horloger),  
Entra dans sa boutique et, cherchant à manger,  
Ne trouva pour tout repas  
Qu’une lime en acier, qu’il se mit à ronger.  
La lime lui dit, sans se fâcher :  
« Pauvre ignorant ! que cherches-tu à faire ?  
Tu t’attaques à plus dur que toi,  
Petit serpent à la tête folle :  
Plutôt que de m’enlever  
Ne serait-ce qu’un quart d’une obole,  
Tu te casserais toutes les dents. »  
Ceci s’adresse à vous, esprits du plus bas niveau,  
Qui, n’étant bons à rien, cherchez surtout à nuire.  
Vous vous épuisez en vain.  
Pensez-vous que vos dents puissent endommager  
De si beaux ouvrages ?  
Ils sont pour vous comme du bronze, de l’acier, du diamant.



Présentation :

« Le Lièvre et les Grenouilles » est la quatorzième fable du Livre II de Jean de La Fontaine, publiée en 1668. Elle met en scène un lièvre accablé par la peur, qui envisage de mettre fin à ses jours. Mais en voyant des grenouilles s’enfuir à son approche, il réalise que d’autres sont plus craintifs que lui. Morale : Il n’est point de poltron qui ne trouve un plus poltron que lui.

– Jean de La Fontaine (1668)

Un lièvre, dans son terrier, était plongé dans ses pensées  
(Car que faire dans un terrier, sinon réfléchir ?) ;
Pris d'un profond ennui, il se laissait envahir par la tristesse :
Cet animal est mélancolique, rongé par la peur.
« Les personnes naturellement peureuses
Sont, disait-il, bien malheureuses ;
Elles ne peuvent savourer un seul morceau.
Jamais un plaisir pur ; toujours des assauts divers.
Voilà comment je vis : cette crainte maudite
M'empêche de dormir, sauf les yeux ouverts.
Corrigez-vous, dira quelque sage cervelle.
Et la peur se corrige-t-elle ?
Je crois même qu'en toute honnêteté
Les hommes ont peur comme moi. »
Ainsi raisonnait notre lièvre,
Et pourtant, il restait aux aguets.
Il était incertain, inquiet ;
Un souffle, une ombre, un rien, tout lui donnait la fièvre.
L'animal mélancolique,
En méditant sur ce sujet,
Entendit un léger bruit : ce fut pour lui un signal
Pour s'enfuir de sa tanière.
Il alla se promener au bord d'un étang :
Les grenouilles aussitôt sautèrent dans l'eau ;
Les grenouilles rentrèrent dans leurs grottes profondes.
« Oh ! dit-il, j'en fais faire autant
Qu'on m'en fait faire ! Ma présence
Effraie aussi les gens ! je mets l'alarme au camp !
Et d'où me vient cette vaillance ?
Comment ? Des animaux qui tremblent devant moi !
Je suis donc un foudre de guerre !
Il n'est, je le vois bien, si poltron sur la terre
Qui ne puisse trouver un plus poltron que soi. »



Présentation :

Cette fable très courte, issue du Livre I des Fables de Jean de La Fontaine (publiée en 1668), est une adaptation d’une fable d’Ésope. Elle met en scène un coq qui découvre un diamant, mais le dédaigne au profit d’un grain d’orge. La fable souligne que la vraie valeur des choses dépend de leur utilité pour chacun. Morale : Ce qui est précieux pour certains ne vaut rien pour d’autres s’il ne répond pas à leurs besoins.

– Jean de La Fontaine (1668)

Un coq fouillait le sol pour chercher de quoi manger,  
et découvrit un diamant.  
« C’est sans intérêt, dit-il,  
sauf peut-être pour un bijoutier.  
À quoi me sert cette pierre brillante ?  
J’aurais préféré un grain d’orge,  
car j’aurais pu le manger.  
Celui-ci ne m’est d’aucune utilité. »



Présentation :

« Le Lion et le Singe » est une fable tirée du Livre XI des Fables de La Fontaine (1678). Elle narre comment le Lion, désirant désigner un successeur, convoque plusieurs prétendants, dont le Singe, attirés par la flatterie. En fin de compte, le Lion choisit celui qui a su le mieux le servir et le divertir. Morale : celui qui flatte et amuse le puissant gagne plus que celui qui se contente de le conseiller.

– Jean de La Fontaine (1678)

Le Lion, souhaitant qu’on choisisse un successeur,  
Décida de réunir sa cour pour entendre les candidats.  
Tous vinrent offrir leurs services,  
Mais aucun ne parut aussi adroit que le Singe.

Le Singe usa de flatterie et présenta  
Des anecdotes, des jeux, beaucoup d’agilité.  
Les autres faisaient des discours, mais sans charme.  
Finalement, le Lion déclara :  
« Mon successeur sera celui qui m’a réjoui,  
Celui qui sait me distraire et m’apporter de la joie. »

Le Singe fut choisi, grâce à son esprit et son humour.



Présentation :

« Le Cheval et le Loup » est la 8ᵉ fable du Livre V de Jean de La Fontaine, publiée en 1668. Inspirée d’Ésope, elle met en scène un loup, affamé au sortir de l’hiver, qui rencontre un cheval paisiblement au pré. Le loup, jugé trop rusé, se retire : il préfère la facilité à un effort risqué. Morale : mieux vaut éviter les difficultés quand une proie facile est hors de portée.

– Jean de La Fontaine (1668)

Un loup, sorti de son long jeûne hivernal,  
Vit un cheval paître dans un pré verdoyant.  
« Quelle joie ! se dit-il, celui-là ferait un bon repas. »  
« Si c’était un mouton, je l’attraperais vite ;  
Mais un cheval demanderait trop de ruse et d’efforts. »  
Il songea à piéger l’animal… puis recula.  
Il renonça, préférant chasser une proie plus facile.